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Suzanne

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Suzanne Kabok

Suzanne Kabok

Suzanne est morte.

À la demande de B, nous avons veillé le corps de Suzanne avec D, dans le froid et la pénombre de la chambre du service « réanimation » de l’oncopole de Toulouse où elle s’est éteinte.

Je suis content d’être arrivé à temps de Paris et d’avoir eu la chance de voir quelques minutes sa faible respiration soulever encore sa poitrine 1h avant qu’elle ne s’interrompe définitivement.

J’ai pu toucher brièvement la peau de sa main et de son front encore chaude d’un souffle de vie.

J’ai touché à nouveau du bout des doigts le dessus de son poignet alors qu’elle n’était plus. Le contact fut glacé cette fois, bien évidemment, comme on le dit dans les films et dans la littérature.

Le chagrin n’est pas toujours fait uniquement de tristesse. Le dit-on aussi parfois dans la littérature ou les films ? Parfois le chagrin est à sa place. Il faut le vivre pour le savoir. Pour savoir combien le chagrin peut être juste, peut prendre justement sa place pour se mettre en équilibre avec la mort si triste, elle, si injuste.

Tout au long de ces heures passées près de son corps inerte avec D, dans le train, puis seul à l’hôtel et encore maintenant, de retour chez moi, j’ai eu en tête une ritournelle chantée par une femme et reprise en choeur par des hommes, des soldats. Il s’agit de la chanson qu’interprète timidement devant les troupes la, pas encore, future madame Kubrick, à a fin des « Sentiers de la gloire ».

La chanson s’appelle « Der treue Husar » (Le Hussard fidèle).On peut l’entendre à 4 minutes 28 de cet extrait telle qu’elle me trotte dans la tête encore à l’instant où j’écris en pensant à Suzanne :

https://www.youtube.com/watch?v=s3ifRA0Kj-8

Avant de devenir Christiane Kubrick, la jeune actrice allemande exerçait son métier sous le nom de Susanne Christian. Sans doute est-ce dans ce deuxième prénom de baptême, Suzanne, mis en avant pour se créer un nom de scène qu’il faut chercher une raison à l’entêtante présence de ce refrain en arrière-plan de mon esprit durant ces quelques jours.

Brézide filme, Suzanne sourit, Any lit | Chez Arnaud | 1984
Brézide filme, Suzanne sourit, Any lit | Chez Arnaud | 1984

La Suzanne que j’ai connue, elle, était professeur d’allemand. Elle aurait traduit sans mal les paroles de ce Hussard fidèle que je ne peux comprendre sans son aide.

Les voici :

Susanne Christian dans la scène finale de "Les sentiers de la goire" devant la caméra de son futur mari Stanley Kubrick
Susanne Christian (Christiane Kubrick), devant la caméra de son futur mari, chante « Der treue Husar » à des soldats, debout comme une maîtresse d’école devant sa classe, touchant chaque enfant au coeur | Les sentiers de la gloire (Paths of glory) | Stanley Kubrick | 1957

1. Es war einmal ein treuer Husar,

Der liebt’ sein Mädchen ein ganzes Jahr,
|: Ein ganzes Jahr und noch viel mehr,
Die Liebe nahm kein Ende mehr. 
2. Der Knab’ der fuhr ins fremde Land,
Derweil ward ihm sein Mädchen krank,
|: Sie ward so krank bis auf den Tod,
Drei Tag, drei Nacht sprach sie kein Wort. 
3. Und als der Knab’ die Botschaft kriegt,
Daß sein Herzlieb am Sterben liegt,
|: Verließ er gleich sein Hab und Gut,
Wollt seh’n, was sein Herzliebchen tut. 
4. Ach Mutter bring’ geschwind ein Licht,
Mein Liebchen stirbt, ich seh’ es nicht,
|: Das war fürwahr ein treuer Husar,
Der liebt’ sein Mädchen ein ganzes Jahr. 
5. Und als er zum Herzliebchen kam,
Ganz leise gab sie ihm die Hand,
|: Die ganze Hand und noch viel mehr,
Die Liebe nahm kein Ende mehr. 
6. « Grüß Gott, grüß Gott, Herzliebste mein!
Was machst du hier im Bett allein? »
|: « Hab dank, hab Dank, mein treuer Knab’!
Mit mir wird’s heißen bald: ins Grab! » 
7. « Grüß Gott, grüß Gott, mein feiner Knab.
Mit mir wills gehen ins kühle Grab.
|: « Ach nein, ach nein, mein liebes Kind,
Dieweil wir so Verliebte sind. » 
8. « Ach nein, ach nein, nicht so geschwind,
Dieweil wir zwei Verliebte sind;
|: Ach nein, ach nein, Herzliebste mein,
Die Lieb und Treu muß länger sein. 
9. Er nahm sie gleich in seinen Arm,
Da war sie kalt und nimmer warm;
|: « Geschwind, geschwind bringt mir ein Licht!
Sonst stirbt mein Schatz, daß’s niemand sicht. 
10. Und als das Mägdlein gestorben war,
Da legt er’s auf die Totenbahr.
|: Wo krieg ich nun sechs junge Knab’n,
Die mein Herzlieb zu Grabe trag’n? 
11. Wo kriegen wir sechs Träger her?
Sechs Bauernbuben die sind so schwer.
|: Sechs brave Husaren müssen es sein,
Die tragen mein Herzliebchen heim. 
12. Jetzt muß ich tragen ein schwarzes Kleid,
Das ist für mich ein großes Leid,
|: Ein großes Leid und noch viel mehr,
Die Trauer nimmt kein Ende mehr. 

 

David Noir

David Noir, performeur, acteur, auteur, metteur en scène, chanteur, plasticien, vidéaste, bricoleur sonore, enseignant... trimbale sa nudité polymorphe et son enfance costumée sous le regard et aux oreilles de qui veut voir et entendre.

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